Ceci est une capsule temporelle inversée. Un retour du futur.
Je viens de rencontrer mon moi de dans 20 ans.
Il m’attendait, et m’a donné cette lettre.
« Salut Max,
Content de te retrouver.
A l’heure qu’il est tu dois te retrouver avec un paquet de questions.
Des petites et des grosses,
Des locales et des globales.
Heureusement, tu vas t’en sortir, la preuve, c’est que je suis là pour te l’écrire.
Je me rappelle quand j’étais toi.
Nom d’un chien, j’étais terrorisé.
Le court et le long terme qui s’entremêle.
Un futur aussi flouté qu’un selfie un peu trop arrosé.
Je crois que nos parents ne se posaient pas trop de question finalement.
Un job pas trop dégueu, un bon équilibre vie pro vie perso, et un salaire sympa pour avoir deux ou trois passions et partir en vacances avec sa p’tite famille.
Suffisait de rencontrer la bonne (de personne), d’avoir la chance d’avoir deux ou trois mouflets, trouver un endroit sympa pour faire son nid et travailler pour rendre heureux sa famille.
Si possible faire le bien autour de soi, parce que c’est vrai qu’on vit et qu’on meurt mieux comme ça, le coeur léger d’avoir été gentil.
Mais toi tu sais bien que cet American Dream n’est pas pour toi.
Ni pour aucun de ta génération d’ailleurs.
Et pour voir tout ça d’ici, je te le dis, tu as raison l’ami.
Roo t’inquiètes, y’en a plein que ça ne dérangent pas tant que ça, l’effondrement et compagnie.
On peut largement vivre en faisant comme si de rien n’était.
Tout ce bazar ne concerne finalement que les victimes et les pompiers pyromanes.
Enfin… le monde perd quand même beaucoup de sa magie.
Un peu comme si, une à une, les étoiles s’éteignaient.
Non, je te le dis l’American Dream n’est pas pour vous.
Vous vous faîtes partie, de ceux qui sont bien incapables de détourner leur regard.
Vous n’aimez pas les œillères.
L’effondrement écologique, vous n’arrivez pas à vous en foutre.
Je crois que internet y est pour quelque chose.
Ceux d’avant, les anciens, qui, à l’heure où je t’écris, agonisent d’avoir fait des crédits sur le dos de leurs enfants, étaient un peu comme les cellules non conscientes (et un peu cancereuses).
Tu sais, il y a cette phrase de Saint Exupéry : « Nous n’héritons pas de la terre de nos parents, nous l’empruntons à nos enfants. »
Dans un monde aux ressources limitées, c’est vrai que ça prend tout son sens. Chaque ampoule allumée, chaque vidéo 4K regardée, chaque trajet en fossile fait disparaître quelque chose qui ne reviendra plus.
Nous demandons un crédit, que l’on sait insolvable, à nos enfants.
Vous, j’ai l’impression que vous avez acquis une sorte de conscience collective et planétaire à force d’être connectés.
Tu verras par la suite que ça vous sera incroyablement utile.
C’est grâce à vous qu’on est là, qu’on s’en est pas trop mal tiré.
Même si tout n’est pas tout rose, ce que vous avez fait a eu un sacré impact et continue de changer les choses.
Ici, on est de plus en plus à se considérer comme de simples et modestes membres d’un équipage de vaisseau spatial, le vaisseau Terre.
Et c’est grâce à vous, alors merci.
A ton époque, je me souviens que j’étais abasourdi de voir le nombre d’esclaves énergétiques que vous aviez.
Pour vivre dans une opulence pas si jouissive que ça en plus, finalement.
Aujourd’hui on doit faire avec beaucoup moins.
Mais rassures-toi, on n’est pas revenu au moyen âge pour autant.
Grosso modo, on a gardé le progrès technologique utile.
Tu sais le genre de recherches et de développement qu’on ferai à bord d’un vaisseau spatial pour améliorer le système et découvrir les lois de l’univers.
On a éliminé en revanche tout le « faux » progrès qui sert à « avoir plus » et « avoir mieux », pour mieux vomir d’avoir trop bouffé.
Le coup de la 4K, de la 5G, le divertissement illimité, la junkfood, la viande à outrance et compagnie… c’est terminé.
Tu imagines que deux champs sur trois étaient des forêts qui ont été rasées pour cultiver la nourriture du bétail ? Deux champs sur trois… juste pour la culture du burger.
Les anciennes générations étaient de piètres colocataires de vaisseau spatial.
Sérieusement, c’est tant mieux, on avait vraiment l’impression de vivre avec rois et reines capricieux à l’appétit monstrueux, toujours à la recherche de plus en plus d’esclaves énergétiques à asservir.
C’est qu’il en faut du monde pour pédaler, lorsque tous tes vœux doivent être exaucés.
Et tout ça, encore une fois je te le dis, c’est grâce à toi et tes amis.
Si ma mémoire est bonne tu vous comparais à des Résistants de 39-45, ou encore aux Rebelles de Star Wars.
Ca m’a toujours fait marrer.
Quand je te vois à te débattre maladroitement, je me dis que j’aurais été fier d’avoir un fils comme toi.
C’est marrant ça d’ailleurs.
C’est plus facile d’être fier de toi que d’être fier de moi et de ce que j’ai fait.
Pourtant c’est du pareil au même non ?
Mais bon, passons, il vous reste encore énormément de chemin à parcourir et il n’y aurait rien de pire que de vous laisser croire que c’est gagné d’avance.
A ce propos, il vaudrait peut-être mieux que je te prévienne.
Tu sais… tout ne va pas être tout rose.
Tu l’as peut-être déjà compris mais… il y aura des pertes.
Certains vont mourir de votre combat.
C’est sûr que pour le moment, ça parait complètement aberrant.
Mais si ma mémoire est bonne ce n’est l’histoire que de quelques mois…
Je sais que vous êtes tous contre la violence et toi particulièrement.
Toi, ton dada, c’est la construction du monde de demain, via l’entrepreneuriat par exemple.
Même si tu te dis de la Rebellion, pour rien au monde tu ne prendrais les armes pour tuer quoi que ce soit.
Mais… tout ne se fera pas aussi gentillement que tu le crois.
Il y a pas mal de héros de ton camp qui n’en reviendront pas.
Et en plus de ça, une partie de la population voudra les traîner dans la boue, en les traitant d’éco-terroristes.
Même si toi et les autres comprenaient bien qu’il ne s’agissait là que de sabotages, sans violence physique.
Mais lorsque le système se sent menacé, il est prêt à tout pour se perpétuer.
Et même si votre mouvement était profondément non-violent, le système lui, se fichera pas mal de faire des morts et des blessés.
Alors, si je devais te donner un conseil de moi à moi, je te dirais de faire gaffe à ceux qui voudront vous diviser.
Tu sais, même si pour certains de ton époque ils n’étaient que des « terroristes/fanatiques écologiques », nous ici, les traitons en véritables héros.
Oublie pas que le mot « terroriste » a été inventé par Vichy pour désigner les Résistants.
En vérité, ils n’étaient pas terroristes en ce sens qu’ils ne voulaient pas plonger le monde dans la terreur.
Le sabotage pour eux n’était qu’un moyen d’action, et non une fin en soi.
Comme pour les Résistants et la Rebellion.
Ce n’était pas des gens qui voulaient détruire le système mais qui voulaient sauver le système Terre, et tous ses Vivants.
Quitte à emmerder les pharaons et leurs 417 esclaves énergétiques, dans le confort de leur petite vie.
Sauf que les pharaons eux, ça les a tellement énervés qu’ils sont devenus violents, eux.
Si tu savais comme je suis désolé de t’apprendre ça…
Mais si je te dis ça, c’est parce que j’aurai aimé le savoir avant.
Pour comprendre pour de vrai, et les soutenir de leur vivant plutôt que d’attendre 10 ans avant de les pleurer.
C’était des héros. Vraiment.
Oublies pas que les Résistants de la seconde guerre mondiale qui faisaient péter des ponts ne le faisaient pas de gaieté de cœur.
Ils savaient qu’il y aurait des dommages collatéraux (parfois très lourd à payer), et que le petit maire du village, un attentiste ni résistant ni collabo, allait les traiter de tous les noms d’avoir détruit l’ouvrage d’art principal de sa petite bourgade.
Ils ne l’ont pas fait pour semer la terreur, mais pour lutter contre l’Occupation.
Pour revenir à ton présent et à la construction du monde de votre demain, je sais que j’ai pu compter sur toi.
Même aujourd’hui on a encore besoin de gens comme vous, dans ta communauté de Marketing Resistant, pour réinventer le tissu économique avec des entreprises écologiques.
C’est un processus très lent mais au fur et à mesure, l’ancien monde laisse place au nouveau, et comme je te le disais tout à l’heure, on est de plus en plus à avoir comme vocation de chouchouter le vaisseau spatial et son équipage de vivant humains et non-humains.
On en finit peu à peu avec l’économie de l’opulence, du plaisir et des caprices.
Ca va peut-être t’étonner (je sais que beaucoup de ton époque étaient anti-capitalistes) mais la civilisation à garder le libéralisme comme structure de base pour l’économie.
Mais ça va mieux qu’avant, le libéralisme a retrouvé son étymologie de « liberté » pour les individus.
C’est le capitalisme qui en a pris un coup.
Interdit désormais l’accumulation ostentatoire de richesses. Les sociétés ne peuvent plus grossir indéfiniment.
Et on a même mis dans leur devoir une comptabilité triple capital (économique, humain et écologique).
C’est à dire que ne sont rentables que les entreprises qui améliorent le vaisseau Terre et la vie de ses habitants humains et non humains.
Exit toutes les compagnies extractives qui font de l’argent rien qu’en creusant le sol.
T’imagines ce genre d’entreprises sur un vaisseau spatial ? D’autant plus si elles détruisent le système de survie en exploitant leurs précieuses ressources. Ce serait aberrant sur un vaisseau spatial.
Nous sommes sur un vaisseau spatial.
Alors on l’a interdit.
Le Earthship-PIB ne peut plus croître de détruire l’environnement ou les Vivants.
Je sais ça parait énorme dit comme ça, mais en fait c’était pas si compliqué.
On aurait jamais réussi à changer complètement le système (et ça aurait été pour le remplacer par quoi?), alors on l’a contraint.
Un peu comme dans les écosystèmes naturels : tout est libéral mais la taille des bestioles et des populations sont contraints par des lois physiques et physiologiques.
Il a suffit de faire pareil avec les écosystèmes économiques et leurs bestioles d’entreprises : ces organismes non plus ne devaient pas avoir le droit de grossir indéfiniment.
Et ça aussi c’est grâce à toi et ta bande de Résistants des quatre coins du monde.
Vous, les écolos qui voulez un futur souhaitable, avez contribuez inlassablement, tous les jours, à changer les choses.
Encore une fois, quand je vois comme vous avez modelé toute une génération pour devenir l’humble équipage du vaisseau spatial, je ne peux qu’être fier de vous.
Bon, il se fait tard et je vais devoir te laisser.
Et puis je ne veux pas tout te raconter. Y’a du très beau comme du très (très) triste qui vous attend.
On se retrouvera dans quelques années.
Ah oui, j’oubliais, concernant tes questions sur comment à la fois gagner sa croûte et participer à la construction d’un monde meilleur, ne t’en fais pas trop.
Ton intuition est bonne.
Il faut oser quitter l’ancien monde et rejoindre ou lancer des entreprises qui changent le monde.
Ca fait peur et c’est plus dur que d’être au chaud et bien payé par l’ancien monde pour exploiter des parts de marchés ou des ressources naturelles.
Mais de ce que je vois d’ici, tous ceux qui ont franchi le pas ne le regrettent pas.
Malgré les galères et les désespoirs.
On est tous d’accord pour dire que, quand on ne sait pas détourner le regard, on n’a pas le choix.
Pas le choix d’entrer en résistance.
Fais attention à toi, donne tout ce que tu peux, agrandis vos rangs pour que le phénomène de percolation arrive le plus vite possible,
Et peut-être que vous ferez encore mieux que nous.
J’aurai rêvé pouvoir montrer à mes enfants les interminables étendues immaculées de l’Antarctique, la grande Barrière de corail,
Et tous ces animaux, girafes, lions, guépards, requins dont parlent désormais les légendeset les petites figurines en jouet.
J’aurai aimé surtout qu’ils puissent s’émerveiller des espèces vivantes inconnues, plutôt que des cadavres gisants.
Ne doutes jamais qu’un petit groupe de personne peut changer les choses.
C’est grâce à une poignée d’hommes et de femmes tels que Paul Watson, de Sea Shepherd, que nous pouvons encore aujourd’hui rencontrer des baleines au milieu de l’océan.
S’il n’avait pas été là, elles auraient disparues.
Je sais que certains de chez vous l’ont traité de tous les noms.
Mais 20 ans plus tard, c’est devenu un héro. Nous le remercions d’avoir eu le courage d’agir et de nous avoir léguer ces espèces cétacés.
A toi de jouer maintenant.
Tu as 28 ans, il te reste encore quelques années pour te battre auprès de ceux qui résistent.
Bon courage, et ne lâche rien.
Ton futur toi, Maxence. »
PS: pour rejoindre la Résistance Entrepreneuriale et apprendre à créer, petit à petit, une entreprise écologique qui démode l’ancien monde, c’est par ici :www.marketing-resistant.com