Je reviens d'un intense voyage perdu dans le Cantal.
J'y ai vu des forêts, des plaines, des pâturages, des petits lacs au coucher du Soleil.
J'avais l'impression de découvrir une exoplanète ou un immense vaisseau spatial, d'une beauté et d'une technologie incroyable.
Je me suis dit que peut-être que ce vaisseau n'avait pas toute notre considération parce que ce n'est pas nous qui l'avions construit.
Les coupes razes et les forêts sans vie sauvage m'ont profondément attristé.
(la silviculture crée des forêts mais c'est une véritable hécatombe pour les Vivants, il n'y a que des arbres, très peu d'oiseaux et d'arbustes grandissant sous la protection des grands arbres)
Mais, une fois monté en haut des cols, une énergie profonde m'envahissait.
Mon regard parcourait l'horizon et cette pensée, maintes fois répétée, m'obstinait : je vivais la merveilleuse aventure de vivre à bord d'un vaisseau spatial qui ressemble à s'y méprendre avec un paradis.
Il suffirait d'un rien, juste d'une contagion sociale à grande ampleur, pour que l'on ressente cette "conscience planétaire".
Lorsque le ciel est d'un bleu éclatant, je ne peux m'empêcher d'y voir un gigantesque hublot.
Lorsque mes poumons s'emplissent d'une partie de l'atmosphère, des larmes de gratitude me montaient aux yeux en pensant à tous ces petits êtres qui oeuvrent à le rendre si bon et si vital.
Lorsque la nuit tombe et que l'on peut regarder le Soleil dessiner une palette de couleur d'une beauté hors de l'entendement, je ne peux dorénavant plus qu'y voir une sorte de miracle scientifique, d'un grand feu perdu au milieu de rien qui nous atteint.
Je ne peux qu'avoir envie de remercier cette boule qui ne sais rien des merveilles qu'elle crée à millions de kilomètres d'elle.
(pour le Soleil, nous ne sommes que des étoiles parmi d'autres, perdues dans un noir profond, comme Mars, Vénus ou Saturne le sont pour nous)
Comme Vénus ne sait rien qu'on l'a surnommé ici, à bord du vaisseau spatial, "l'étoile du Berger", car c'est elle que l'on voit en premier et qu'elle a guidé des dizaines de milliers d'hommes et de femmes à travers les siècles.
Impossible pour elle de savoir l'effet, certes insignifiant à certains égards, qu'elle a eu sur nous.
Je me dis qu'on peut tous et chacun être l'étoile insignifiante de quelqu'un ou quelque chose.
C'est pensée me rassure. Quoi que l'on fasse, nous existons comme une étoile.
Et puis la nuit tombe pour de vrai, les astres s'allument par millier.
Je me sens alors comme sur le pont d'un navire gigantesque, au clair de Lune, à contempler la mer et les étoiles.
Je me sens au bord de ce grand tout.
Un gigantesque hublot donnant sur l'océan des étoiles.
Et nous sur ce vaisseau.
Et tous ces gens qui vivent ce miracle sans en avoir conscience.
Je me dis qu'on pourra vivre avec ce dédain que lorsque nous serons capables de construire des vaisseaux qui naviguent sans coque, avec des conditions optimales pour la vie,donnant sur le vide intersidéral.
Un énorme bouclier magnétique qui nous protège des vents dévastateurs solaires, quelques nuages boucliers qui apportent un peu d'ombre, de repos et d'eau vitale à l'ensemble des habitants du vaisseau.
Nul besoin de payer ces prestations extraordinaires.
Nous sommes les héritiers d'une demeure magnifique et rudement bien conçue.
Il eut seulement fallu qu'il eut été conçu par un architecte humain de renom pour qu'on l'acclame et qu'on en fasse une légende historique (salut Elon Musk).
Mais non, ce n'est pas de notre fait, alors, tels des ados pourris gâtés, on respire sans s'en rendre compte.
On consomme les économies en énergies et en ressources sans se soucier du miracle qu'elles soient là.
La surconsommation et le capitalisme, dans ce paradigme, m'importe peu.
Il s'agit là de gratitude, de respect et d'amour profond.
Nos ancêtres ont crée des Dieux a vénéré à tout prix. Etait ce une tentative de "humaniser" ces grands architectes à qui l'ont doit tout ?
Si c'était vraiment des architectes de génie, fait de chair et d'os, peut être ces religions auraient pris un autre tournant.
Peut-être que le rêve fou de la technologie et de l'Homo Deus (Homme Dieu de Harari) se réalisera un jour et que l'on comprendra à ce moment les prouesses véritablement stupéfiantes qu'il faut pour créer tout ce niveau de complexité.
Et peut que l'on respectera cet ouvrage gigantesque car il sera humain, lui.
On aura de quoi se donner de bonnes tapes dans le dos pour se féliciter d'être des génies.
Mais j'aurai préféré que le vaisseau initial soit compris et respecté plus tôt.
Car si ces architectes ne sont peut être pas humains, ils sont en tout cas Vivants.
J'aimerai donner cette tape dans le dos à tous les petits ếtres de cette planète, pardon, ce vaisseau.
Les féliciter de ce qu'ils accomplissent, un à un, alors qu'une partie de l'équipage leur met des bâtons dans les roues, les asservit et les extermine.
Tout ça pour manger de la viande à tous les repas (la culture humaine, c'est important vous comprenez et cela justifie la déforestation du temple de l'Amazonie), et se créer des gadgets qui consomment une énergie que l'on a hérité – le soleil ancestral stocké dans des combustibles fossiles – et nous font sentir puissants outre mesure.
On a tous, individuellement et collectivement, dans les Etats ou les entreprises, envie de puissance.
Et c'est la fonction du marketing que de promettre cette puissance.
Mais, collectivement, à l'echelle des Vivants, nous l'avons déjà : nous vivons sur un vaisseau spatial paradisiaque.
Voilà ce que m'a révélé ce voyage, cette visite des dédales du vaisseau.
Le désir d'accomplir cette volonté de puissance collectivement, avec tous les Vivants, plutôt qu'individuellement.
Se sentir puissants, réalisé ce fantasme intemporel et inalliénable, ensemble.
Se battre pour la Vie comme on défend des prouesses technologiques.
Prendre soin des écosystèmes avec autant de soin que si c'était nous qui avions bâti ces cathédrales.
C'est un peu la mission que je voudrais pour notre tribu.
Comprendre et ressentir cette conscience planétaire, cette puissance déjà là.
Et vendre cette satisfaction au travers de tout ce que l'on consomme.
Vendre une satisfaction plutôt qu'une frustration.
Rendre désirable ce qui est déjà là, ce qui est nécessaire à la Vie sur le vaisseau.
Mais pour cela, il va falloir qu'on travaille fort vous et moi Bastien.
Même si les autres ne comprennent pas tout.
Même si on nous critique à tout va à coup de cohérence, de libéralisme, de grands méchants marketeux ou entrepreneurs capitalistes.
Il faut se battre pour ça, pour le vaisseau et son équipage.
Ensemble, nous sommes déjà puissants. Les Vivants ont colonisé cette planète avant Elon Musk (même si une part de moi aime beaucoup ce qu'il fait et la vision de "propager la vie" pour laquelle il se bat).
Alors vendons cette satisfaction à tous ceux qui croisent notre route.
(je sais, ça fait un peu secte dis comme ça, mais promis je ne vous prendrais pas tout votre argent ni ne vous exhorterais à couper vos relations sociales)
Changeons la fonction du marketing avec cette idée en tête.
Rendre puissant par la satisfaction de l'inconnu déjà là, plutôt que par la promesse de réinventer la roue du vivant pour se flatter d'avoir copier la "Nature", ou de pouvoir regarder n'importe où et n'importe quand notre cher Netflix.
Et peut-etre que si cette idée germe et grandit, nous pourrons vivre dans une société biocentrique où l'on respecte les petits êtres qui font fonctionner le système de survie avec autant d'humilité et de gratitude que lorsque l'on salue une femme de ménage ou un architecte talentueux.
A nous de jouer.
A demain.
Maxence
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Plus on sera nombreux, plus le monde de demain arrivera vite.
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Visite poétique d’un vaisseau spatial